L’étant, Esther Denis, 2021 © Pierre-Yves Dougnac
Techniques mixtes : eau, encore noir, poudre nacrée, mousse, plantes, terre, céramique, oiseau
naturalisé, miroir, mousseline de soie, métal
Une installation de Esther Denis
Chorégraphie : Cassandre Cantillon, Cintia Sebök et Cheyenne Illegems
Image : Charlotte Muller
Création sonore : Nathan Van Brande
Création textile : Mathilde Vanlint
Mapping : Pierre-Yves Dougnac
Taxidermie : Pierre-Yves Renkin
Encadrer l’infini
Un visage, des yeux avec au centre une pupille noire, un miroir noir.
Le Miroir noir, ou Miroir Claude, est un petit objet optique, convexe, teinté de noir, circulaire ou rectangulaire, très prisé par les artistes et les promeneurs de la fin du XVIIIe siècle. Il encadre les sujets qui s’offrent à lui, en souligne les intensités lumineuses, accentue les contrastes et, surtout, reflète le monde en noir et blanc. Ainsi, il met en scène le réel, l’installe à distance, organise sa représentation, délimite notre rapport à l’environnement ; il métamorphose la réalité en un tableau.
En 1861, la Forêt de Fontainebleau est encadrée par une mesure de préservation ordonnée par Napoléon III et devient alors le premier site naturel protégé au monde. Cette décision visait à conserver la dimension artistique du site, elle entendait protéger le « point de vue » des peintres.
Nous vivons aujourd'hui une crise écologique, qualifiée également de crise de la sensibilité. L’installation L’étant s'y intéresse du point de vue des outils et dispositifs qui ont participé à cette transformation du vivant en décor. Il s’agit, entre autres, du miroir noir, du diorama et des camera obscura et lucida. Ces dernières subliment le jeu de la représentation. Au moyen d'un trou ou d'une lentille, elles permettent une image inversée, fragmentée et poudrée de l’extérieur. Comme l’écrivait le peintre David Hockney qui a travaillé sur cette gémination de l'art du pinceau et des outils de la science en démontrant l’utilisation des instruments optiques dans la réalisation des œuvres : "C'étaient des projections vivantes ; autrement dit, s'il y a des fleurs, ces fleurs finiront par mourir. Si c'est une personne, elle finira par bouger".
L’étant puise son esthétique dans cet entrelacement de l’histoire de l'art avec celle des sciences.
Une nappe d’eau noire dans une salle noire. Des narcisses au bord de l’eau. Une vanité sous la forme d’une pintade naturalisée. Dans l’eau trouble, les reflets d’un autre monde. Au centre, des ombres passent sur un miroir de nacre, que des gouttes font osciller. Le reflet de Narcisse, la chaire de sa peau qui se mêle à celle de la rivière ; ils ne font qu’un. Dans l’air, l’écho fantomatique d’un paradis.
L’ombre, le reflet et l’écho, les « figures du double », selon l’expression du philosophe Clément Rosset, à la fois garantes de la réalité et facteurs d’illusion.
L’installation a pour ambition de politiser l’émerveillement, de renouveler notre intérêt pour le terrestre, sa beauté et ses mystères. L'étant est un œil proposant un regard autre sur le vivant. Cet émerveillement s’ancre au cœur d’un diorama ; un dispositif scénographique permettant, historiquement, la reconstitution naturaliste d’un monde fantasmé par la mise en mouvement d’une peinture. Il se caractérise par sa dimension formelle : l’aménagement d’éléments en volume devant une toile peinte rétro-éclairée. L’objet diorama fascine tant par sa dimension technique (réalisme, effet d’illusion...) que par sa finalité liée à la possibilité d’un monde issu d’un autre temps et d’un autre espace.
Optique et mapping vidéo, odorat et nappes sonores, taxidermie et chorégraphie se superposent pour multiplier les voies d’accès à l’imaginaire tout en complexifiant, et en magnifiant, un rapport cosmogonique au vivant. "Paradis" est précisément le nom donné aux dioramas associant des objets réels (reliques) à d’autres dits artificiels (artefacts). « Ces choses, parce qu'elles sont fausses, sont infiniment plus près du vrai » écrivait Baudelaire dans son Salon de 1859.
L'installation suggère une coexistence du réel et de l’irréel, du visible et de l’invisible, du vivant et de l’inerte, de l’ombre et de la lumière…
L’étant tente d’être le simulacre de cet infini sous nos pieds.
Une installation de Esther Denis
Chorégraphie : Cassandre Cantillon, Cintia Sebök et Cheyenne Illegems
Image : Charlotte Muller
Création sonore : Nathan Van Brande
Création textile : Mathilde Vanlint
Mapping : Pierre-Yves Dougnac
Taxidermie : Pierre-Yves Renkin
Encadrer l’infini
Un visage, des yeux avec au centre une pupille noire, un miroir noir.
Le Miroir noir, ou Miroir Claude, est un petit objet optique, convexe, teinté de noir, circulaire ou rectangulaire, très prisé par les artistes et les promeneurs de la fin du XVIIIe siècle. Il encadre les sujets qui s’offrent à lui, en souligne les intensités lumineuses, accentue les contrastes et, surtout, reflète le monde en noir et blanc. Ainsi, il met en scène le réel, l’installe à distance, organise sa représentation, délimite notre rapport à l’environnement ; il métamorphose la réalité en un tableau.
En 1861, la Forêt de Fontainebleau est encadrée par une mesure de préservation ordonnée par Napoléon III et devient alors le premier site naturel protégé au monde. Cette décision visait à conserver la dimension artistique du site, elle entendait protéger le « point de vue » des peintres.
Nous vivons aujourd'hui une crise écologique, qualifiée également de crise de la sensibilité. L’installation L’étant s'y intéresse du point de vue des outils et dispositifs qui ont participé à cette transformation du vivant en décor. Il s’agit, entre autres, du miroir noir, du diorama et des camera obscura et lucida. Ces dernières subliment le jeu de la représentation. Au moyen d'un trou ou d'une lentille, elles permettent une image inversée, fragmentée et poudrée de l’extérieur. Comme l’écrivait le peintre David Hockney qui a travaillé sur cette gémination de l'art du pinceau et des outils de la science en démontrant l’utilisation des instruments optiques dans la réalisation des œuvres : "C'étaient des projections vivantes ; autrement dit, s'il y a des fleurs, ces fleurs finiront par mourir. Si c'est une personne, elle finira par bouger".
L’étant puise son esthétique dans cet entrelacement de l’histoire de l'art avec celle des sciences.
Une nappe d’eau noire dans une salle noire. Des narcisses au bord de l’eau. Une vanité sous la forme d’une pintade naturalisée. Dans l’eau trouble, les reflets d’un autre monde. Au centre, des ombres passent sur un miroir de nacre, que des gouttes font osciller. Le reflet de Narcisse, la chaire de sa peau qui se mêle à celle de la rivière ; ils ne font qu’un. Dans l’air, l’écho fantomatique d’un paradis.
L’ombre, le reflet et l’écho, les « figures du double », selon l’expression du philosophe Clément Rosset, à la fois garantes de la réalité et facteurs d’illusion.
L’installation a pour ambition de politiser l’émerveillement, de renouveler notre intérêt pour le terrestre, sa beauté et ses mystères. L'étant est un œil proposant un regard autre sur le vivant. Cet émerveillement s’ancre au cœur d’un diorama ; un dispositif scénographique permettant, historiquement, la reconstitution naturaliste d’un monde fantasmé par la mise en mouvement d’une peinture. Il se caractérise par sa dimension formelle : l’aménagement d’éléments en volume devant une toile peinte rétro-éclairée. L’objet diorama fascine tant par sa dimension technique (réalisme, effet d’illusion...) que par sa finalité liée à la possibilité d’un monde issu d’un autre temps et d’un autre espace.
Optique et mapping vidéo, odorat et nappes sonores, taxidermie et chorégraphie se superposent pour multiplier les voies d’accès à l’imaginaire tout en complexifiant, et en magnifiant, un rapport cosmogonique au vivant. "Paradis" est précisément le nom donné aux dioramas associant des objets réels (reliques) à d’autres dits artificiels (artefacts). « Ces choses, parce qu'elles sont fausses, sont infiniment plus près du vrai » écrivait Baudelaire dans son Salon de 1859.
L'installation suggère une coexistence du réel et de l’irréel, du visible et de l’invisible, du vivant et de l’inerte, de l’ombre et de la lumière…
L’étant tente d’être le simulacre de cet infini sous nos pieds.
« Un étang noir dans une salle noire. Des narcisses au bord de l’eau.
Une vanité sous la forme d’une pintade empaillée.
Dans l’eau, les reflets d’un autre monde.
Au centre des ombres qui passent sur un miroir de nacre.
Dans l’air, l’écho fantomatique du paradis.
Cette installation est sublime, mais elle est aussi
extrêmement intelligente, complexe, référencée.
Elle découle d’une lecture d’Esther Denis,
celle du philosophe Clément Rosset qui décrit ce que fait l’homme
pour survivre quand le réel devient insupportable,
il crée un double de ce réel le paradis.
Il se berce de cette illusion, invente un monde artificiel où il n’y a pas de tragédie.
Un an de recherche autour du paradis et de sa représentation ont été nécessaires
pour construire cette œuvre d’art. Elle prend la forme d’un diorama.
Cette mise en scène que l’on retrouve dans les musées d’histoire naturelle.
Historiquement, un diorama qui mêle éléments naturels
et artificiels s’appelle justement un paradis. »
Margaux Brugvin
Une vanité sous la forme d’une pintade empaillée.
Dans l’eau, les reflets d’un autre monde.
Au centre des ombres qui passent sur un miroir de nacre.
Dans l’air, l’écho fantomatique du paradis.
Cette installation est sublime, mais elle est aussi
extrêmement intelligente, complexe, référencée.
Elle découle d’une lecture d’Esther Denis,
celle du philosophe Clément Rosset qui décrit ce que fait l’homme
pour survivre quand le réel devient insupportable,
il crée un double de ce réel le paradis.
Il se berce de cette illusion, invente un monde artificiel où il n’y a pas de tragédie.
Un an de recherche autour du paradis et de sa représentation ont été nécessaires
pour construire cette œuvre d’art. Elle prend la forme d’un diorama.
Cette mise en scène que l’on retrouve dans les musées d’histoire naturelle.
Historiquement, un diorama qui mêle éléments naturels
et artificiels s’appelle justement un paradis. »
Margaux Brugvin
Inflorescence , 2022
Création vidéo et costumeTechniques mixtes : eau, encore noir, mousse, plantes, mousseline de soie
Une création vidéo de Esther Denis
Couture : Mathilde Vanlint
Interprétation : Cassandre Cantillon
Captation vidéo : Lachlan Mackenzie
Création sonore : Nathan Van Brande Texte : Juliette Renard
Une création vidéo de Esther Denis
Couture : Mathilde Vanlint
Interprétation : Cassandre Cantillon
Captation vidéo : Lachlan Mackenzie
Création sonore : Nathan Van Brande Texte : Juliette Renard
Inflorescence tente de représenter l’instant de la métamorphose
végétale de Narcisse, quand sa peau de jeune garçon se mue en
fleur. Complémentaires par leurs textures, leurs matières, leurs
couleurs ; l’humain et le non-humain se mêlent, se transforment en
environnement organique total.
Sur le corps du danseur, les reflets de la lumière dans les feuillages et les mouvements des végétaux dans le vent ne sont pas seulement des décors ; ce sont à la fois les matières et les sujets.
Sur le corps du danseur, les reflets de la lumière dans les feuillages et les mouvements des végétaux dans le vent ne sont pas seulement des décors ; ce sont à la fois les matières et les sujets.
Echo, 2023
Photographies et sculptures
Techniques mixtes : agrandisseur photographique, eau, diapositives, verre, métal
Une installation de Esther Denis
Avec Olivia Ross
Création sonore : Nathan Van Brande
Ferronerie : Clara van der Belen
Une installation de Esther Denis
Avec Olivia Ross
Création sonore : Nathan Van Brande
Ferronerie : Clara van der Belen
Echo initie une réflexion sur le purgatoire au travers de la métamorphose minérale d’une jeune femme. L’installation investit un ancien laboratoire de développement argentique, plongé dans l’obscurité. Sous huit agrandisseurs photographiques gisent des images qui semblent liquides, des pierres qui semblent en train de fondre et dont la forme en amande suggère la cornée de Écho, un souvenir de son regard en cours de pétrification.
D’elle, il ne reste que l’écho de sa voix. On l’entend lire un extrait d’un texte de Victor Hugo issu de ses Travailleurs de la mer, qui décrit une analogie entre le paysage minéral d’une grotte et la forme d’un crâne. Toute idée d’une nature perçue comme un tableau est rejetée, le spectacle plastique devient spectacle vivant, les corps de chair enlacent les corps de pierre.
D’elle, il ne reste que l’écho de sa voix. On l’entend lire un extrait d’un texte de Victor Hugo issu de ses Travailleurs de la mer, qui décrit une analogie entre le paysage minéral d’une grotte et la forme d’un crâne. Toute idée d’une nature perçue comme un tableau est rejetée, le spectacle plastique devient spectacle vivant, les corps de chair enlacent les corps de pierre.